En rafale

Quand la vague populiste déferle sur l’Europe…

Le parti populiste de droite allemand, Alternative für Deutschland (AfD), a remporté plus de 20% des voix au scrutin du 4 septembre dernier dans le land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale. Bien qu’il n’ait pas remporté l’élection, il s’agit d’une progression importante pour le parti, qui a ainsi devancé le candidat de la formation de la chancelière allemande Angela Merkel, relégué en troisième position. Ce succès s’inscrit dans un mouvement d’essor des partis populistes européens – de gauche comme de droite. D’ici 2018, le calendrier électoral du Vieux continent s’annonce particulièrement chargé et pourrait donner encore plus de poids à cette tendance anti-establishment dont voici les enjeux essentiels à retenir:

  • Une seconde élection présidentielle aura lieu le 2 octobre en Autriche, après l’annulation du scrutin du 22 mai dernier dû à des irrégularités sur le vote par correspondance. Alexander Van der Bellen, ex-membre du parti vert, avait devancé son opposant Norbert Hofer du parti populiste de droite (Parti de la liberté d’Autriche, FPÖ) par seulement 30 000 voix (sur près de 4,5 millions).

 

  • En Italie, un référendum sur une réforme constitutionnelle majeure devrait avoir lieu d’ici la fin novembre. Visant à corriger l’instabilité chronique qui afflige le système politique italien, il s’agit également d’un test de confiance envers le président du conseil, Matteo Renzi, et pourrait mener à des élections anticipées advenant un échec. Le parti populiste Mouvement 5 étoiles (M5E), dont l’élan sur la scène politique italienne s’est récemment matérialisé par des victoires aux élections municipales de Rome et Turin, pourrait être le véritable vainqueur de ce référendum, même s’il s’oppose fermement à la réforme du parlement. Si le référendum est rejeté, le M5E pourrait former le prochain gouvernement de coalition en cas d’élections anticipées. S’il est approuvé, les élections de 2018 verront naître le premier gouvernement majoritaire sans coalition de l’histoire moderne italienne. Advenant une victoire du M5E dans ces nouvelles conditions institutionnelles (rôle du Sénat diminué et bonus de siège au parti vainqueur lui assurant la majorité absolue), le mouvement de Beppe Grillio aurait les mains libres pour engager l’Italie et l’Europe vers une nouvelle crise majeure, le M5E souhaitant sortir de l’euro. Dans les plus récents sondages, le Parti démocratique de Renzi est au coude à coude avec le M5E.

 

  • L’impasse persiste toujours en Espagne, alors que le Parti populaire (PP, centre-droit), vainqueur minoritaire des élections de juin dernier, peine à former un gouvernement. Un nouveau scrutin pourrait ainsi avoir lieu d’ici la fin de l’année si aucun progrès n’était fait au Parlement – ce qui forcerait les Espagnols à voter une troisième fois en 12 mois seulement. La fragmentation du vote, notamment avec la montée du parti populiste de gauche Podemos, contribue à l’instabilité et au blocage politique, cela dans un contexte de croissance importante de la dette publique.

 

  • Des élections présidentielles et législatives en France et des élections générales en Allemagne sont prévues en 2017. Selon les plus récents sondages, Marine Le Pen et le Front national (FN) devancent tous les prétendants avec près de 30% des voix, ce qui la qualifierait d’office pour le second tour qu’elle remporterait – toute chose égale par ailleurs – contre n’importe quel candidat de gauche, le traditionnel pacte républicain ayant été brisé par la droite. En Allemagne, la montée progressive d’AfD est corrélée à la perte de support des deux grands partis traditionnels. La rhétorique protectionniste, anti-Europe et anti-immigrante semble ainsi trouver un écho de plus en plus fort dans les deux principales économies du continent européen.

Ces échéances électorales apporteront davantage de volatilité et d’instabilité dans une Europe qui n’en manque déjà pas après la crise des migrants, les tensions avec la Russie, la croissance anémique ou les enjeux relatifs au Brexit, dont on ignore toujours quand Theresa May engagera les négociations de retrait. Il est d’ailleurs probable qu’elle attende de connaître ses prochains homologues allemands et français, qui détermineront assurément la trajectoire de négociation.

 

Par Véronique Jobin, analyste géopolitique

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