La Fédération de Russie est souvent accusée d’aller à l’encontre de certains droits humains fondamentaux. Pourtant, selon les lois constitutionnelles fédérales, elle prétend respecter tous ses citoyens et leur accorder leurs droits humains, tels que la liberté d’expression, la liberté d’association, l’interdiction de toutes formes de discrimination, etc. Cependant, selon les faits, on constate une toute autre réalité. En effet, malgré la présence de l’article 19.1 dans la constitution, qui affirme que «tous sont égaux devant la loi et le tribunal»1, les avocats de l’opposition affirment la présence d’une injustice frappante lors des procès,. Par exemple, en 2013, Alexeï Navalny, avocat s’opposant au président et au gouvernement russe, est accusé de détournementsdes fonds d’une société publique d’exploitation forestière. Selon lui, cette accusation est fabriquée de toute pièce, mais le Ministère de la Justice pense autrement.
Alex Navalny lors d’un rassemblement à Saint-Petersbourg (2012-02-25)
Photo par Anna Plotnikova
Ainsi, la sentence était de cinq ans de prison, malgré que trente-trois témoins sur trente-cinq aient témoigné en faveur de M. Navalny2 D’ailleurs, les médias américains et européens considéraient qu’Alexeï Navalny était un prisonnier politique.3 Finalement, en 2016, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) affirme que les droits de l’opposant ont été brimés en faveur des autorités russes et oblige Moscou à verser à Navalny 56 000 euros comme compensation morale ainsi qu’à rembourser les frais du procès.4 Ainsi, il est clairement possible de constater que la voix des opposants est réprimée. Depuis l’arrivée de Vladimir Poutine, avec son concept de «dictature de la loi», la liberté de contestation est limitée et très encadrée.5
De plus, les journalistes subissent une censure qui va à l’encontre de leur liberté de presse, malgré l’article 29.1 qui stipule qu’«à chacun est garanti la liberté de pensée et de parole»6. Le meilleur exemple est celui de l’assassinat d’Anna Politkovskaïa. Cette femme était une journaliste qui travaillait pour le journal Novaia Gazeta.
Anna Politovskaia, 17 Mars 2005.
Puisqu’elle critiquait ouvertement la politique du Kremlin dans ses articles, Vladimir Poutine l’avait ajoutée sur la liste noire du gouvernement. 7La journaliste russe dénonçait surtout les injustices quant à la liberté de presse, les meurtres en Tchétchénie, le contrôle que l’État exerce sur les médias et plus encore. Politkovskaïa voulait absolument «réveiller» la population et lui faire comprendre les inégalités qui se produisent au sein de leur pays. Son but n’était que de faire développer un esprit critique chez les citoyens russes. Évidemment, ça ne fait pas le bonheur de Poutine qui tente absolument de prouver la croissance de la Russie autant à l’intérieur que sur la scène internationale. 8En 2012, après plusieurs enquêtes sérieuses, on conclut que le meurtre a été commis par DmitriPavlioutchenkov, un ancien membre des forces de police.9 Selon Reporters sans Frontières, depuis que Vladimir Poutine est à la tête du pays, on estime qu’une vingtaine d’assassinats de journalistes se sont produits en Russie. 10
Il est évident qu’en Russie les atteintes à la liberté d’expression, d’association et de réunion ne sont pas rares. En effet, souvent lors des manifestations pacifiques, surtout à Moscou ou à Saint-Pétersbourg, on remarque une violence anormale de la part des autorités policières.11 Par exemple, en mars 2012, plusieurs personnes se sont mobilisées dans la rue dans une manifestation «anti-Poutine» afin de dénoncer les fraudes électorales suite à l’élection de Vladimir Poutine pour son troisième mandat. On estime que plus d’une centaine d’opposants ont été arrêtés. Aussi, les individus protestant dans la rue étaient séparés à coups de matraque.12 Cette répression brutale commise par la police empêche les citoyens de bénéficier pleinement de leurs droits.
Aussi, l’État a le contrôle sur les médias ce qui lui permet de censurer et de projeter ce qui lui convient. Ceci va évidemment à l’encontre de l’article 29.5 qui affirme que la censure est interdite.13En effet, sous le pouvoir de Vladimir Poutine, les chaînes de télévision et de radio russes sont dans l’obligation d’encourager un patriotisme prononcé notamment par la musique et les concerts montrés sur les chaînes télévisées. De plus, les valeurs militaristes et favorables à un État puissant sont grandement médiatisées. 14 Il faut aussi noter qu’environ la moitié de tous les journaux télévisés traite des actions de Poutine et d’informations à son sujet.15Cette dominance que l’État emploie sur les médias exerce une manipulation sur la population.
Par ailleurs, les informations qui se rendent à nous quant à ce manque de justice ne sont qu’une infime partie de ce qui se passe sur place. Effectivement, chaque année Amnesty International enregistre des assassinats des militants de droits russes ou des personnes victimes de torture. Sans oublier les nombreux cas d’agressions face aux individus de minorités ethniques ou d’orientation sexuelle marginale. D’ailleurs, le racisme et la xénophobie ne sont pas très tabous dans leur société. En 2008, les organisations russes de défense des droits humains recensent jusqu’à 87 morts et 378 blessés liés à ce type de violence. 16Depuis les dernières années, on remarque que certains jeunes homosexuels vivant à l’extérieur des grandes métropoles décident de quitter leurs villes rurales, car la population plus âgée ne les accepte pas.17
Pour finir, en avril 2006, une nouvelle loi sur les organisations non gouvernementales apparaît. Celle-ci oblige les ONG à suivre une procédure d’enregistrement excessivement stricte.18 De ce fait, seulement 80 ONG (sur plus de 300) ont réussi à se faire enregistrer. On parle ici des ONG telles que HumanRights Watch, Amnesty International et Médecins sans frontières. 19De plus, avec cette loi, les financements étrangers pour les ONG sont limités.20
En bref, même si les droits sont bel et bien présents dans la constitution russe, il est évident qu’ils ne sont pas tous respectés.
Veronica Rusu,
Étudiante en sciences humaines au Collège Jean-de-Brébeuf
BIBLIOGRAPHIE
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AFP, France 24. (24 avril 2013). Alexeï Navalny, icône anti-Poutine, à nouveau devant la justice russe [Communiqué de presse]. Repéré à http://www.france24.com/fr/20130424-alexei-navalny-icone-anti-poutine-justice-russie-proces/
David, M.Herszenhorn, The New York Times. (19 juillet 2013). Putin Critic Gets 5-Year Jail Term, Setting Off Protests [Communiqué de presse]. Repéré à http://www.nytimes.com/2013/07/19/world/europe/russian-court-convicts-opposition-leader-aleksei-navalny.html
Doc.School : recherche et publication de documents. (2013) L’assassinat d’Anna Politkovskaïa. Repéré à https://docs.school/sciences-politiques-economiques-administratives/sciences-politiques/dissertation/assassinat-anna-politkovskaia-journaliste-russie-393218.html
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La Presse Russe. Anna Politovskaïa : l’enquête sur DmitriPavlioutchenkov est terminée
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Radio-Canada avec Agence France-Presse et Reuters. (10 mars 2012). Nouvelles manifestations anti-Poutine en Russie [Communiqué de presse]. Repéré à http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/553221/russie-manifestations-moscou
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verser-56-000-euros-a-alexei-navalny_570561
Reporter sans Frontières, “Rapport annuel 2007”, 2007 (consulté le 28 novembre 2016) p. 130
Sénat : un site au service des citoyens. Union européenne – Russie : quelles relations?. (2016). Repéré à https://www.senat.fr/rap/r06-307/r06-3079.html
20 Minutes. (31 juin 2012). Russie: Un blogueur anti-Poutine inculpé [Communiqué de presse]. Repéré à http://www.20minutes.fr/monde/979591-20120731-russie-blogueur-anti-poutine-inculpe
1 La constitution de la fédération de Russie. (2016).
2 RBTH. (1 décembre 2016). La Russie condamnée à verser 56 000 euros à Alexeï Navalny [Communiqué de presse].
3 David, M.Herszenhorn, The New York Times. (19 juillet 2013). Putin Critic Gets 5-Year Jail Term, Setting Off Protests [Communiqué de presse].
4 RBTH. (1 décembre 2016). La Russie condamnée à verser 56 000 euros à Alexeï Navalny [Communiqué de presse].
5 Piotr, Smolar, Le Monde. (18 juin 2013). Cinq ans de prison pour l’opposant russe Alexeï Navalny : « Ne soyez pas résignés ! [Communiqué de presse].
6 La constitution de la fédération de Russie. (2016).
7Doc.School : recherche et publication de documents. (2013) L’assassinat d’Anna Politkovskaïa.
8Doc.School : recherche et publication de documents. (2013) L’assassinat d’Anna Politkovskaïa.
9 La Presse Russe. Anna Politovskaïa : l’enquête sur DmitriPavlioutchenkov est terminée [Communiqué de presse].
10 Reporter Sans Frontières, « Rapport annuel 2007 » , 2007 (consulté le 28 novembre 2016) p. 130
11 Sénat : un site au service des citoyens. Union européenne – Russie : quelles relations?. (2016).
12Radio-Canada avec Agence France-Presse et Reuters. (10 mars 2012). Nouvelles manifestations anti-Poutine en Russie [Communiqué de presse].
13 La constitution de la fédération de Russie. (2016).
14 L’intelligence économique russe sous Poutine. (2009). Études internationales, volume 40 (numéro 4), p. 631-646
15 Gherardi, Sophie, Le Monde. (16 octobre 2006). Une Russie imprégnée de violence [Communiqué de presse]
16 Amnesty International. (2010). Droits humains en Russie : Résister pour l’état de droit. Dans CAIRN
17Wackerman, G., Auburtin, É., Deshaies, M., Dumont, G-F., Édelbluttles, S., Fayaud, V., Kouzmina-Kriajeva, N. (2007). La Russie. France : Ellipses Éditions Marketing S.A. p.252
18 Sénat : un site au service des citoyens. Union européenne – Russie : quelles relations?. (2016).
19AFP, Le Monde. (17 octobre 2006). En Russie, des ONG vont devoir suspendre leurs activités [Communiqué de presse].
20 Sénat : un site au service des citoyens. Union européenne – Russie : quelles relations?. (2016).
