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Le Canada et l’OTAN : implications spécifiques du Sommet de Varsovie pour la politique de défense du Canada et la place canadienne au sein de l’OTAN

En ce début d’année 2017, la prise de fonction de Donald Trump ne cesse d’engendrer des interrogations quant à la future politique étrangère des États-Unis. Entre ses déclarations électorales sur l’OTAN et les récentes évolutions qu’a connues celle-ci, proposer une analyse sur cette thématique peut s’avérer des plus utiles. C’est à cette tâche que s’est attelée la conférence internationale d’une journée intitulée « L’OTAN après le Sommet de Varsovie : Quelle place pour le Canada au sein de l’Alliance atlantique ? », organisée le 18 novembre dernier à l’Université de Montréal. Donnons la parole aux conférenciers :

Lors de son discours d’honneur, le général français Denis Mercier, commandant suprême allié Transformation de l’OTAN, a présenté le rôle unique du Canada dans l’OTAN. Le général Mercier a souligné que le Canada joue un rôle important compte tenu de son expérience opérationnelle (comme en témoigne son engagement en Afghanistan et son rôle de soutien au Mali) et de sa position géographique et politique (comparable aux États-Unis en termes de taille et de géographie, mais aussi comparable aux pays européens en termes de population et de capacités militaires). Le Canada pourrait jouer un rôle crucial dans la redéfinition de la position de l’OTAN dans six domaines fonctionnels clés: les structures de commandement et de contrôle (e.g. les liens du Canada avec le Pacifique et le Grand Nord); la logistique (e.g. les différents pôles logistiques au sein du Canada), l’entrainement (e.g. le rôle du Canada dans l’exercice Trident Juncture de 2015, gestion de distance et préparation opérationnelle), partenariats (e.g. l’expérience du Canada à développer des hubs); le développement des capacités (e.g. l’expertise du Canada dans la technologie d’imagerie, robotique spatiale, drones maritimes); ainsi que le capital humain (e.g. intégration des femmes, soutien familial).

Yves Brodeur, ancien Représentant permanent du Canada auprès de l’OTAN, a souligné l’importance pour le Canada de réfléchir à son rôle au sein de l’OTAN, mais aussi aux avantages de sa contribution. Les contributions les plus importantes du Canada à l’OTAN comprennent 1) sixième plus grande contribution au budget de l’OTAN; 2) contribution non négligeable à la ISAF; 3) un des quatre pays-cadres à déployer des troupes en Europe de l’Est (Lettonie) après le Sommet de Varsovie de 2016; 4) contribution à la résolution de la crise ukrainienne; 5) participation à l’opération Unified Protector. Dans l’ensemble, il est important de souligner que le Canada répond toujours aux appels de l’OTAN, sans aucune réserve. Le plus récent exemple est son engagement à envoyer des troupes en Europe de l’Est, une région où les contributions des États européens laissent à désirer. Toutefois, si le Canada doit soutenir plus fortement l’alliance militaire transatlantique, il devrait également faire pression pour une plus grande présence politique et influence au sein du Conseil. Cela pourrait inclure le lobbying pour plus de représentants canadiens dans les positions clés de l’OTAN. Il a mis en garde contre une érosion des règles et institutions multilatérales, mais également appelé à se méfier des débats tournant uniquement autour des dépenses de défense.

Le lieutenant-général Michel Maisonneuve, Directeur académique du Collège militaire royal de Saint-Jean et ancien chef d’état-major du SACT de l’OTAN, a souligné que l’examen en cours de la défense du Canada résultera certainement dans une contribution renforcée à l’OTAN. En faisant écho aux remarques du Général Mercier, LGen Maisonneuve a également discuté des domaines clés pour la contribution unique du Canada à l’OTAN, y compris son expérience en logistique, interopérabilité des systèmes, navigation dans le Grand Nord et promotion de l’égalité des sexes. Il a souligné en plaisantant que l’OTAN a la faiblesse d’être une alliance politico-militaire (de longues négociations précèdent souvent la position consensuelle au Conseil), mais aussi la force d’être une alliance militaro-politique (avantage du commandement intégré effectif de l’OTAN). LGen Maisonneuve a également souligné que le Commandement suprême des Forces alliées (SACT) représente le lien transatlantique de l’OTAN, id. est la seule structure de l’OTAN basée de manière permanente sur le continent nord-américain. Il a suggéré que le Canada devrait jouer un rôle plus actif au sein du SACT.

Pendant la discussion, les participants ont posé des questions sur la contribution de l’OTAN à la coalition anti-Daesh. Les panélistes ont souligné que le Canada continuera à jouer un rôle de soutien non combattant. Les participants se sont également interrogés sur la pertinence de l’OTAN à s’engager dans le Pacifique. Les panélistes ont répondu qu’il est important de suivre l’évolution de la situation dans le monde entier, y compris dans le Pacifique, compte tenu de l’interdépendance des défis actuels en matière de sécurité.

 

Propos recueillis par Borzillo Laurent et Dominika Kunertova,
Doctorants en Science Politique,Université de Montréal

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